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L’agriculture dans le commerce international – quelques données clés

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Je profite de la tenue du Salon de l’Agriculture, lieu de réunion d’un des plus puissants lobbies de France et d’Europe, de l’annonce du lancement d’un accord de libre-échange avec les Etats-Unis où les médias ne parlent que de ce qu’il y a de moins important dans la relation commerciale entre ces deux blocs économiques (qui sont des économies industrielles et servicielles!), de la mémoire encore fraîche des affreuses négociations sur le prochain budget de l’Union européenne, pour rappeler quelques chiffres sur l’agriculture dans les économies de ce monde….

Les produits agricoles représentent un dixième des échanges internationaux.

L’agriculture représente une part minime de la valeur ajoutée et des emplois dans les pays avancés : par exemple, 1.5% du PIB et 3.6% des emplois de la zone euro. Ces chiffres sont de d’1.8% du PIB et 2.9% des emplois pour la France et 1.2% du PIB et 1.6% des emplois pour les Etats-Unis.[1] L’agriculture occupe cependant une part importante dans les économies des pays en voie de développement, par exemple en moyenne 12.1% de la valeur ajoutée des pays d’Afrique sub-saharienne et près de 50% des emplois. Dans les grands pays émergents elle représente une part déclinante bien qu’encore importante de la valeur ajoutée : elle se situe à 5.1% du PIB (17% des emplois) du Brésil, à 17,2% (21% des emplois) en Inde et à 10% en Chine (moins de 40% des emplois)[2].

Le commerce des produits agricoles est largement dominé par les Etats-Unis et l’Union européenne bien que leur part dans celui-ci se trouve en déclin relatif. Selon l’OMC, l’Union européenne à 27 représentait 10,2% des exportations mondiales de produits agricoles en 2000. Cette part a décliné légèrement à 9,5% en 2010. Les Etats-Unis ont vu un déclin relatif plus important de leur  part dans les exportations mondiales, qui est passée de 13% en 2000 à 10.1% en 2010. Ces parts ont largement été capturées par le Brésil, et l’Indonésie, dont la part dans les exportations mondiales est passée de 2,8% à 5,2% et de 1,4 à 2,9% respectivement. La Chine aussi a vu ses parts dans les exportations mondiales de produits agricoles augmenter, bien qu’à moindre échelle (de 3 à 3,9% entre 2000 et 2010).[3]

Les exportations agricoles dans le monde ont explosé durant la dernière décennie. Le déclin relatif de l’Europe et des Etats-Unis n’est pas un déclin réel des exportations. En effet, entre 2000 et 2011, selon les derniers chiffres de l’OMC les exportations de l’UE vers le reste du monde ont presque triplé, pour passer de 56 à 158 milliards de dollars. Pour les Etats-Unis, les exportations sont passées de 71 milliards de dollars en 2000 à 168,2% en 2011. La croissance des exportations brésiliennes (de 15.5 à 68.6 milliards de dollars entre 2000 et 2011) et indonésiennes (7.8 à 48.1 milliards) a été encore plus fulgurante.

Comparé à l’industrie, le secteur agricole est fortement protégé face à la concurrence d’importations. Cette protection se manifeste par les droits de douane et quotas élevés, comme le montrent quelques exemples dans le tableau ci-dessous, ainsi que les subventions à la production (voire à l’exportation). Ainsi dans la grande majorité des pays membres de l’OCDE la moyenne des droits de douane est plus élevée que pour les biens industriels (4% en moyenne pour l’Union européenne). L’ « assistance » donnée par les Etats à l’agriculture (subventions à la production, droits de douane, quotas)  montre qu’en moyenne les pays avancées de l’OCDE de l’Université Nationale d’Australie   protègent leur agriculture à 34%, alors que les pays en voie de développement la protègent à 7% seulement. Depuis deux décennies, les pays avancés ont tendanciellement baissé la protection douanière et les subventions à l’agriculture, tandis que les pays en voie de développement, qui s’enrichissent, commencent eux à s’y mettre[4].

Droits de douane non préférentiels appliqués en pourcentage de la valeur du produit ou bien droits levés dans le cadre de quotas

Pays membre de l’OMC

Bœuf, frais ou réfrigéré
HS 02110

Tomates, fraîches ou réfrigérées
HS 0702

Froment (blé) ou méteil
HS1001

Afrique du Sud

[40% or 240c/kg]

15,0

0,0

Brésil

10,0

10,0

5,0

Chine

20,0

13,0

65,0

Corée, République de

40,0

45,0

2,6

États-Unis d’Amérique

26,4/[4.4 cents/kg] [4.4 cents/kg]

[2.8 cents/kg] [2.8 cents/kg] [3.9 cents/kg]

2,8

Fédération de Russie

[15 but not less than 0.2 euro per1 kg.]

[15 but not less than 0.08 euro per1 kg.][15 but not less than 0.12 euro per1 kg.] [15 but not less than 0.12 euro per1 kg.]

5,0

Inde

30,0

30,0

25,0

Indonésie

5,0

5,0

1,3

Japon

38,5

3,0

3,3

Mexique

20,0

10,0

50,3

Turquie

225,0

48,6

54,2

Union européenne

[12.8 + 176.8 €/100 kg/net]

[14.4 + 29.8 €/100 kg/net] [8.8 + 29.8 €/100 kg/net]

12,8

Source: OMC. Base de données tarifaire

Les pays avancés et en voie de développement dépendent très différemment de l’agriculture pour leurs exportations. Selon les données de l’OMC[5], en 2011, 54.4 % des exportations de marchandises du Kenya et 44,7% de celles du Guatemala étaient des exportations agricoles. Par contraste, seulement 7,4% des exportations de marchandises de l’UE27 et 1.3% de celles du Japon sont agricoles. Les exportations de la France et des Etats-Unis, puissances exportatrices agricoles majeures s’il en est, font une part plus importante aux biens agricoles – 14% et 11.4% respectivement. Les nouvelles puissances exportatrices agricoles – Brésil et Indonésie font aussi une part belle aux produits agricoles dans leur panier d’exportations 33,8% et 24% respectivement. Malgré des taux de protection relativement élevés, les pays avancés – US et UE notamment – sont les plus importantes destinations des exportations agricoles mondiales, avec une part croissante détenue par les principaux pays émergents – comme la Chine ou l’Inde, voire la Turquie, qui, eux aussi, tendent à protéger assez fortement leur agriculture des importations.

Conclusions? Les agriculteurs des pays sont les enfants gâtés des pays avancés!! Les protectionnistes de gauche s’opposant à tout accord de libre-échange doivent faire attention de ne pas se retrouver à défendre les intérêts d’un agribusiness subventionné par les contribuables mais qui a un poids économique faible et qui emploie peu de personnes, mais dont la puissance politique est immensément disproportionnée à son apport réel à la communauté. Ceux qui pensent en France avoir sauvé l’Europe et la PAC en acceptant un compromis a minima sur le budget européen qui bénéficie à 40% aux agriculteurs- revoyez votre copie.


[1] Source pour le paragraphe ci-dessus: base de données de la Banque mondiale (visitée le 15 janvier 2012).

[2] Ibid.

[3] OMC, Statistiques du Commerce International 2012.

[4] K. Anderson, « Costing Global Trade Barriers, 1900 to 2050”, Working Paper No. 2012/08, Australian National University.

[5] Profils de pays membres de l’OMC. Site internet http://www.wto.org



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